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Conversation avec Juan Sasturain
Pays : France
Editeur : Rackham
Année d'édition : 2019
Première édition : 2013
460 pages
16,5 x 24 cm - 1 400 gr
Langue : Français
ISBN : 9782878272314
Certains livres doivent être des monuments, celui-ci en est un. L'intention de l'éditeur, sa motivation transparaissent de la forme de l'opus : de toute évidence, il a semblé, lors de sa conception, que sa forme devait laisser voir immédiatement son importance. Façon sans doute ici de rendre un hommage à l'artiste dont le livre porte le nom, d'ériger la seule vraie statue qui vaille pour un auteur de bande dessinée : lui édifier un grand livre, imposant. Reste à savoir si l'objet y gagne. Pas sûr : lourd et épais, l'objet est malaisé à prendre en main. Les pages se tournent trop vite car, pour épaissir le livre, on a choisi un corps respectable, qui restera accessible sans lunettes aux yeux fatigués. Dans le même ordre d'idée, on s'interroge sur l'intérêt d'un index courant sur vingt pages quand on aurait pu le rendre plus synthétique sans rien lui ôter de sa facilité d'usage. Il ne faudrait pas, en définitive, que l'effigie de l'immense auteur qu'est Alberto Breccia sonne creux parce qu'on la voulu plus trop grande, trop empesée. D'autant que le lecteur qui, plus attiré par l'œuvre incontournable du dessinateur uruguayen que par l'aspect ampoulée du livre, aurait la bonne idée de lire les propos de l'artiste, ce lecteur donc se comprendrait à quel point Breccia n'était justement pas un artiste hautain, prétentieux, orgueilleux, exigeant sur lui tous les feux de la rampe. Mais votre libraire ne voudrait pas être déplaisant avec un livre qui est loin de le mériter, il est seulement victime d'un amour, certes justifié, mais trop exalté, de ceux qui font perdre la tête. Mais son enthousiasme qui l'alourdit ne le rend pas superficiel, loin de là. Au-delà du texte lui-même, dont nous disons ci-contre qu'il est indispensable, le travail péritextuel tel qu'il s'élabore dans les illustrations et dans les notes finales est remarquable et précieux. Les centaines d'annotations qui s'égrainent tout au long du texte sont une occasion irremplaçable pour découvrir, au-delà de la figure de Breccia, tout le milieu foisonnant de la bande dessinée argentine, très largement ignoré sur nos côtes françaises de l'Atlantique. Artistes, éditeurs, revues… Breccia est un connaisseur averti de l'édition argentine, et les annotations développent des mentions qui seraient pour nous restés mystérieuses. De même, les illustrations, datées, légendées, en couleur quand cela est nécessaire, montrent une partie de l'œuvre de Breccia qui nous est inconnue ici. On pardonnera donc à la maison Rackham de s'être laissé débordée par une admiration que nous partageons, en la remerciant d'avoir porté à nos esprits incapables de lire l'espagnol ce long et formidable livre d'entretiens avec l'un des plus grands artistes de bande dessinée du XXe siècle.
Cet ouvrage est le lauréat du Prix Papiers Nickelés SoBD 2020, qui récompense chaque année un livre remarquable sur la bande dessinée.
Note à l'édition française p. 5
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BREF COMMENTAIRE EN DIFFÉRÉ
Cassettes p. 8
Avatars p. 8
Climats p. 10
Détails p. 12
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LA CHRONIQUE
1. Le gamin p. 15
2. La triperie p. 25
3. Matinée, vermouth, nuit p. 31
4. Les amis et la politique p. 36
5. Le travail de dessinateur p. 41
6. Lainez p. 47
7. El Vengador & Co. p. 59
8. Les années de guerre p. 66
9. Avec Torino, un vrai gentleman p. 70
10. Quinterno, la leçon du maître p. 74
11. La Razon p. 79
12. Vito Nervio p. 83
13. Dessiner des aventures et l'aventure de ne pas dessiner p. 83
14. Peintre du dimanche p. 86
15. Abril, Kapelusz et l'heure des enfants p. 95
16. Panche & Peter p. 100
17. L'homme qui rit p. 104
18. Une célébrité de la Panaméricaine p. 111
19. Œsterheld et le carrefour de Frontera p. 119
20. Les investissements anglais p. 132
21. Europe aller et retour p. 137
22. La crise de 1961 p. 143
23. Mort Cinder p. 151
24. Boulots alimentaires p. 154
25. Les années IDA et Richard Long p. 158
26. Autour de 1968 p. 162
27. Chassé-croisé et explosion de 1970 p. 169
28. Europe, 1973 : premier voyage p. 179
29. Le Yellow-Kid p. 184
30. Un certain Trillo p. 190
31. Le travailleur clandestin p. 195
32. Les années de plomb p. 201
33. Aller et retour du Monstre p. 205
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TENANTS ET ABOUTISSANTS
1. Les goûts et les passions p. 215
2. Des dessinateurs qui vont et qui viennent p. 219
3. Ces Yanquis qui ont tout inventé p. 222
4. Croquis d'après nature p. 231
5. Les lieux de travail p. 236
6. Mythologie de La Cueva p. 240
7. Assistants et collaborateurs p. 243
8. Trois tables et une seule lampe p. 249
9. Les amis p. 251
10. Le rejet de la bande dessinée p. 261
11. Les bandes dessinées / L'enseignement p. 262
12. L'atmosphère p. 271
13. Le style et le concept p. 278
14. Page et séquence, le cœur et la poule p. 286
15. La place de la bande dessinée : le cinéma, l'illustration p. 295
16. Le bras de fer avec le marché. Tensions p. 302
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CONTEXTES
1. Le Tango p. 311
2. Aller au cinéma p. 328
3. Les livres p. 334
4. Le mythe de Breccia Noir p. 351
5. Engager le corps p. 357
6. Les lieux p. 364
7. Mataderos p. 367
8. L'Uruguayen p. 381
9. Les bordels p. 385
10. La foi du sceptique p. 392
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Chronologie de l'œuvre p. 401
Notes p. 417
Index p. 445
Je ne me risquerais pas à expliquer qui était Alberto Breccia et pourquoi il est intéressant de connaître son œuvre et sa propre opinion sur sa vie, son travail et bien d'autres sujets. J'ai eu le plaisir d'écrire et de donner mon avis sur lui à plusieurs occasion, avis qui a toujours rejoint celui de gens bien plus aptes que moi à le définir : Breccia, le Vieux, n'a pas seulement été l'un des plus grands dessinateurs de bande dessinée de tous les temps ; c'était aussi un génie, un homme qui a cassé les codes. De plus, ou surtout, c'était un homme entier qui s'est fait incroyablement seul, d'une pièce aux contours bien définis, droit, honnête, tendre et féroce à la fois, aimable et difficile. Un personnage unique. Absolument inoubliable.
Juan Sasturain
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